Le silence, une guerre insidieuse
Le 1er juillet
Émilie,
un mois déjà est passé sans nouvelle de toi.
J'ai eu besoin de temps avant de réagir à ton dernier texto qui m'annonçait ton départ express.
Je n'ai eu le choix que d'accepter ta décision qui est celle de ne plus vouloir me voir mais sache que la manière dont tu l'as fait, je ne l'approuve pas.
Selon moi, c'était tout, sauf du respect à mon égard.
Heureusement pour moi, j'ai trouvé la force en moi pour me relever après le coup pris en pleine face.
Ben oui, c'est comme ça que je l'ai pris. Ton dernier texto m'a assommé.
J'aurais aimé que tu me le dises en face au lieu de m'envoyer lâchement ce message de rupture.
Je suis suffisamment aguerri pour entendre ce que tu avais à me dire.
En attendant, la fin de la guéguerre entre les humains, je te souhaite d'être bien accordée avec la vie et ceux que tu aimes.
(Dommage pour nous deux, nous étions mal accordés.
Je devais apparemment avoir les cordes trop sensibles ou pas assez flexibles pour créer ensemble une mélodie harmonieuse et oh grand merci, tu n'as rien forcé et oh combien, tu as eu raison car c'est si fragile une corde sensible et peu flexible).
Le 22 juillet
Silence radio de ta part depuis plus de six semaines.
Tu t'es volatilisée.
C'est comme si tu n'avais jamais existé.
C'est étrange cette sensation de s'imaginer qu'entre nous ce n'était pas réel.
Cela appartenait à une autre dimension qui ne peut pas exister dans la vraie vie.
Nous partagions un fantasme.
Impossible pour nous de nous confronter vraiment l'un à l'autre.
À la moindre anicroche et tout s'écroule, le décor tombe et les personnages aussi. Sauve qui peut, allons voir ailleurs si l'amour est plus beau et plus bleu. Car c'est comme ça qu'on se l'imagine l'amour.
L'amour ne peut jamais nous décevoir ou nous frustrer.
Pendant plusieurs mois, je me suis tordu dans tous les sens pour m'assouplir et m'accorder au mieux à ton placement.
Je n'ai pas mesuré les efforts que je faisais pour toi.
Aujourd'hui, je réalise à quel point, je suis aussi un homme fragile. Cela me fait du bien de ne rien forcer en moi. Je vais à mon rythme et je poursuis mon cheminement. Doucement mais sûrement.
Tu as eu raison de cesser entre nous puisque nous avons des besoins très différents, moi c'est la paix de mon âme et toi, c'est le partage des plaisirs des sens. Notre rencontre aura au moins servi à savoir ce que je suis vraiment.
Avant toi, c'était encore flou pour moi.
Mon seul regret, c'est la façon dont ça s'est terminé entre nous. Cela a été trop brutal pour moi. J'aurais aimer y mettre un peu d'humanité, quelques pincées de douceur, une noisette de délicatesse et une bolée de respect.
Le 20 septembre
Je t'écris un dernier mail.
J'ai eu besoin de t'écrire ces trois mails pour m'apaiser.
La vie nous donne de belles leçons de vie.
Je n'ai plus qu'à te dire "merci".
Oui, merci de m'avoir ouvert les yeux sur une partie de moi-même que je ne voyais pas. Oui, j'ai été tête brûlée.
Tu as réussi à me mettre Kao, c'est normal, j'ai pris le risque de venir à toi, toi, la belle amazone irrésistible et tu m'avais prévenu, je prenais un risque. Et je prends ma part de responsabilité, et je te rends la tienne.
Je me sens enfin plus apaisé depuis ton dernier texto.
Je n'ai plus qu'à être et surtout ne rien forcer.
Après la traversée du désert, c'est la paix de l'âme.
Je pensais que le troisième mail était le dernier, je me suis trompé. Après la lecture d'un article sur la loi du silence et ses conséquences néfastes sur la santé, je me suis dit qu'il était important que je te l'envoie et que je m'exprime encore une dernière fois.
Je te le transmets, il t'aidera à comprendre que le silence n'est bon pour personne.
https://nospensees.fr/loi-silence-abus-psychologique-deguise
D'ailleurs, après la lecture de cet article, je ne comprends toujours pas pourquoi tu me fais subir ton silence depuis fin mai ?
Suis je un monstre qu'il faut fuir à tout prix ?
Suis-je si toxique au point de mériter pareil traitement ?
Je me considère comme une homme libre qui a respecté ta liberté d'être et d'ailleurs même si j'ai eu très mal, j'ai respecté ton choix d'avoir cesser notre relation. C'est ton choix de ne plus me voir mais je ne comprends pas les silences que tu m'as infligés depuis la fin mai et tes non réponses à aucun de mes mails de juillet.
C'est comme si tu m'en voulais alors que c'est toi qui a pris la décision de tout arrêter.
T'ai-je empêché de partir ? T'ai-je manquer de respect ?
Ce qui me blesse le plus, c'est la façon dont tu l'as fait.
Tu ne m'as pas ménagé.
C'est comme si, il n'y avait rien eu entre nous de vrai, de bon, de sincère.
Je me suis senti comme un homme qu'on consomme et qu'on jette et non l'homme que tu avais vraiment aimé.
Faisais-tu semblant ou voulais-tu me punir de ne pas répondre à tes attentes.
Et pourquoi me punir si tu m'aimais ?
Il suffisait juste de cesser cette relation entre deux adultes bienveillants l'un envers l'autre.
Ni toi ni moi devions nous forcer à poursuivre si nous aspirions à des désirs différents.
C'est vrai, je croyais qu'avec le temps, j'aurais pu y répondre mais aujourd'hui, je sais que me plier à tous tes désirs n'est pas possible pour moi.
Ce que j'aimais, c'est de me sentir amoureux.
J'aimais surtout me retrouver dans tes bras et sentir nos deux corps se rechercher pour mieux nous rapprocher.
Je n'étais pas addicte de ton corps mais juste heureux de te retrouver quand j'étais disponible pour toi.
J'aimais nous sentir complètement présents l'un à l'autre. Je le prenais comme un cadeau. Et je ne peux donc rien regretter. Oui, tu as eu raison de cesser notre relation. Nous ne partagions pas les mêmes désirs mais cela n'enlève en rien ce que nous avons partagé ensemble.
C'est profondément triste en effet de devoir arrêter et je te remercie d'avoir eu le courage de le faire mais pas de façon aussi brutale. Je n'ai pas pu répondre à tes attentes mais je crois avoir été honnête avec toi en te disant que je ne ressentais pas le besoin de partager mon quotidien avec toi au bout de quelques mois seulement.
J'ai besoin de me retrouver seul pour me ressourcer et partager ma vie avec une femme, je sais que c'est compliqué pour moi. Si toi, en effet, tu veux être en couple au quotidien, je n'étais donc pas celui qui pouvait combler tes désirs.
Et j'en suis profondément désolé.
Je te souhaite sincèrement que tes besoins soient satisfaits avec celui qui partage les mêmes que les tiens.
Quant à moi, j'aspire que nous fassions la paix. Cela donnera du sens à ce que nous avons partagé ensemble.
Te rencontrer m'aura permis de mieux me connaître et de respecter qui je suis vraiment. Un homme qui a aimé se relier à toi sans me perdre, je me suis respecté.
D'ailleurs, qu'est ce que le respect pour toi ?
Une réponse de toi sera le signe que la paix peut exister entre nous. La prolongation de ton silence sera le signe d'une guerre insidieuse qui cherche à me détruire car je ne suis à tes yeux qu'un monstre qui ne mérite pas meilleurs châtiments alors que mes sentiments pour toi étaient bien réels. Je n'ai pas triché avec toi.
Lorens56100 « Le silence, une guerre insidieuse » mars 2019
Les mots mis en cage, le poids du silence.
Le passage à l'acte, un acte compulsif surgissant du silence, des mots qui n'ont pu se dire.
Terme en psychologie clinique : le gosthing.